Test du Samyang 24mm f/1.8 FE en astrophotographie et paysage nocturne : « master of astrophotography » ?

Tests et essais réalisés par Maxime Tessier et David Malattia / Rédaction : Maxime Tessier, David Malattia et Maxime Oudoux

Commercialisé depuis avril 2021, ce tout nouvel objectif fait parler de lui : ce « master of astrophotography » – comme le qualifie Samyang dans ces publicités – propose effectivement des caractéristiques très intéressantes pour les images nocturnes du ciel étoilé. Samyang conforte ici sa place d’objectif de choix pour cette discipline photo, dans laquelle il propose déjà une gamme d’objectifs au rapport qualité/prix parmi les meilleurs du marché.

Cette dénomination de maitre de l’astrophotographie est-elle justifiée ? Nous vous proposons un test particulier, mené par 2 photographes expérimentés en paysage nocturne dans 2 conditions différentes.

Commençons par la fiche technique de ce Samyang 24mm f/1.8 FE :

  • Couverture capteur : Plein format (full frame – 24x36mm)
  • Focale : 24mm
  • Plage d’ouverture : F1.8 – F22
  • Construction optique : 11 éléments en 8 groupes
  • Distance de mise au point minimale : 0,19m
  • Mise au point Autofocus (AF) : Série AF
  • Nombre de lamelles du diaphragme : 9
  • Montures disponibles : Sony E
  • Diamètre de filtre : 58mm
  • Longueur : 71,5mm
  • Poids : 230g (sans bouchons ni paresoleil)
  • Présence de joints d’étanchéité : Oui

Le schéma optique du 24mm f/1.8 FE : seulement 11 lentilles dont 2 ED, 3 « HR » et 2 asphériques. Du point de vue théorique, l’objectif propose un comportement lumineux.

CONSTRUCTION ET PRISE EN MAIN

Le Samyang 24mm f/1.8 présente un design sobre, élégant, dans la lignée de la série des objectifs Autofocus de la marque Coréenne.  L’objectif est compact et très léger (seulement 230g), avec sa construction plastique et métallique.

Peu de commandes sont disponibles, ce qui permet de bien le manipuler de nuit sans se tromper. La prise en main est donc très bonne une fois monté sur le boîtier : l’objectif se fait oublier et toutes ses fonctions sont facilement accessibles. L’objectif dispose d’un bouton commutateur de mode qui permet d’attribuer des fonctions à la bague de mise au point. Par défaut, en mode 1, la bague contrôle la mise en point (si l’appareil est en mode manuel), et en mode 2, l’ouverture du diaphragme. Ces fonctions sont paramétrables via le dock-station de Samyang. La bague de mise au point est très douce à manipuler et ne semble pas hasardeuse ; le moteur qu’elle contrôle est réactif et silencieux. La course de la bague est assez longue, ce qui permet une grande précision de mise au point, particulièrement pour des sources lumineuses ponctuelles comme les étoiles.

LA PARTICULARITE DU 24MM F/1.8 FE : LE MODE « ASTROPHOTO »

L’innovation de ce Samyang 24mm f/1.8, c’est le bouton de mémorisation de la mise au point. Celui-ci permet d’activer le mode mise au point à l’infini, ou mode « astrophotographie ». Pour activer ce mode, il suffit d’allumer le boîtier en restant appuyé sur le bouton de l’objectif. Une LED rouge va alors s’allumer pour indiquer le passage en mode « astro ». Celle-ci passera au vert lorsque la mise au point se sera calée sur la position infini enregistrée dans l’objectif (position d’usine par défaut, ou paramétrable par l’utilisateur).

Nous avons souhaité vérifier la précision de ce mode utilisation après utilisation. L’essai est concluant : la fonction du rappel de mise au point sur l’infini paraît stable ! Après plusieurs montages/démontages, balade dans le sac à dos et quelques variations de température, la mise au point n’a pas changé. On peut ainsi, en toute confiance, se reposer sur cette fonction.  Il est alors possible en un clic de repositionner l’objectif sur la position infini.

Le Samyang 24mm en pleine utilisation, lors des essais par Maxime. Remarquez la LED verte située sur le côté gauche du fût de l’objectif : il indique que la mise au point à l’infini est correct. Cette LED s’éteint lors de la prise de vue, pour éviter tout problème de fuite lumineuse à l’intérieur de l’objectif.

QUALITE OPTIQUE EN PAYSAGE NOCTURNE ET ASTROPHOTOGRAPHIE

L’astrophotographie est une discipline très exigeante pour les optiques. En effet, certains défauts qui pourraient être acceptables voire invisibles de jour, ne le seront pas en photographie de ciel étoilé. Il s’agit de défauts optiques particulièrement visibles sur les sources lumineuses ponctuelles : la coma, l’astigmatisme ou encore les aberrations chromatiques. Nous avons testé l’objectif sur un A7III défiltré de 24mpx (pixels de 5,95 microns) et sur un A7S de 12mpx non défiltré (pixels de 8,4 microns) en photographiant une scène similaire.

Remarque importante : l’objectif testé semble un peu décentré, les étoiles ont des défauts plus prononcés sur le bord droit de l’image. Aussi dans ce test nous avons considéré le meilleur côté (gauche) pour les comparaisons.

  • Comportement sur un boitier A7III (défiltré) de 24mpx avec des photosites de 5,95 microns

La coma est relativement présente sur les bords des images à f1.8. Elle est accompagnée d’un léger astigmatisme. En fermant à f2 et f2.2 les étoiles de bord de champ commencent à s’arrondir. Il faudra fermer à f2.5 pour avoir des étoiles de forme acceptable.

En ce qui concerne les aberrations chromatiques, elles sont très prononcées à f1.8, particulièrement sur les étoiles les plus brillantes. Elles se manifestent sous la forme de halos bleu/violet autour des étoiles, et de franges sur les étoiles situées en bord de champ. En fermant à f2.5 ces aberrations sont fortement diminuées, mais elles ne disparaissent pas totalement, même en fermant à f2.8, voire f4.

Le piqué est bon au centre de l’image dès la pleine ouverture, mais les bords sont très en retrait du fait de la courbure de champ (défaut courant des objectifs grand angle). Le piqué devient très bon et plus homogène sur l’ensemble du champ dès que l’on ferme le diaphragme à f2 ou f2.2.

  • Comportement sur un boitier A7s (Non défiltré) de 12Mpx avec des photosites de 8,4 microns

L’A7s possède des pixels de plus grande dimension, il est ainsi plus permissif vis-à-vis des défauts optiques. A f/1,8 le piqué est globalement bon, en revanche on perçoit de l’astigmatisme et du chromatisme sur les étoiles les plus brillantes. En fermant à f/2 le piqué et le rendu général s’améliore considérablement, le chromatisme diminue également mais reste présent sous forme de halos bleu/violet autour des étoiles les plus brillantes. À f/2.2 et F/2,5 il n’y a pas de gain notable sur l’ensemble de l’image. En revanche lorsque l’on vient fermer l’objectif à f/2,8, l’optique se révèle vraiment très bonne sur l’A7s sur l‘ensemble du champ : l’astigmatisme disparaît et seul l’effet d’une très légère courbure de champ persiste. Quant au chromatisme, il devient résiduel et pourra être facilement corrigé en post traitement. En fermant graduellement on arrive sans surprise à un résultat excellent à f/4, les étoiles sont très fines et le chromatisme disparaît totalement.

Les suivantes images présentent les résultats obtenus avec les deux boitiers sur un champ similaire à f1.8, f2.2 et f2.8.

Le temps de pose est identique pour les 2 boitiers : 8s.

Coin des images à f1.8 (veuillez lire la note importante plus haut à propos du coin supérieur gauche uniquement visible ici)

Coin des images à f2.2 (veuillez lire la note importante plus haut à propos du coin supérieur gauche uniquement visible ici)

Coin des images à f2.8 (veuillez lire la note importante plus haut à propos du coin supérieur gauche uniquement visible ici)

 
  • Vignettage

Très prononcé à f/1.8, il est fortement atténué en fermant à f2 et n’est plus perceptible dès f2.5

Le gif animé suivant présente l’évolution du vignettage en fermant graduellement l’objectif de f1.8 à f4.

 

  • Bokeh

Le flou d’arrière-plan est assez doux : les ronds de bokeh sur les étoiles étoiles sont relativement circulaires, sans défaut apparent et leur déformation en bord de champ reste contenue.

Vignes – A7IIIa, 24mm f1.8, 10 sec à 3200 ISO

 

QUELQUES IMAGES PRISES AVEC CE SAMYANG 24MM F/1.8 FE PAR DAVID ET MAXIME

Arche de la voie lactée – A7IIIa, 18 images de 8 sec à 24mm f2.2, ISO 3200

Arbre – A7S, 1 image de 8 sec à 24mm f2, ISO 3200

Des étoiles dans les vignes – A7IIIa, 2 images de 8 sec à 24mm f2.2, ISO 3200

Région du triangle d’été (champ d’étoiles complet) – A7IIIa, 1 image de 30 sec en suivi à 24mm f2.5, ISO 1600

Kathleen photographie la Voie Lactée Sony A7s, Samyang 24mm f/1.8 @f/2 30s à 12800ISO pour le sol – 8s à 12800ISO pour le ciel

Sony A7IIIa, Samyang 24mm f/1.4 @f2.2, 8s, 3200ISO – panoramique de 10 images

Le Lac des Pises – Sony A7IIIa, Samyang 24mm f/1.8 @f/1.8, 3200ISO – Panoramique de 8x15sec

AVIS DE DAVID MALATTIA

Cet objectif est dans la lignée des autres objectifs de la série Tiny de Samyang : une optique qualitative, ergonomique avec un bon rapport qualité/prix. Samyang essaie d’être innovant avec cette gamme en y apportant de nouvelles fonctionnalités, comme le bouton de mémorisation de mise au point à l’infini avec ce modèle. Le rendu en paysage nocturne est plutôt bon : les étoiles sont bien piquées, la coma est correctement corrigée à partir de f2.5, et le vignettage n’est plus réellement gênant en fermant à f2. Cependant l’objectif est sujet à de fortes aberrations chromatiques (pour un photographe pratiquant régulièrement le paysage nocturne) qui ne disparaissent pas totalement même après avoir fermé le diaphragme à f2.8, voire f4 sur un capteur de 24Mpix. De mon point de vue, le meilleur compromis qualité d’image/quantité de lumière est d’utiliser l’objectif à f2.5, mais cela peut dépendre des exigences de chacun.

Le mode mémorisation de la mise au point pourrait paraître un peu gadget de prime abord, mais cette fonction est très pratique à l’usage : on allume le boîtier et on est près à shooter en toute confiance ! Imaginez par exemple un événement furtif tel un passage de l’ISS : vous voyez apparaître l’ISS à l’horizon, et vous ne voulez pas louper cet instant. Avec cet objectif, le temps d’allumer le boitier, la mise au point est déjà positionnée à l’infini, il ne reste qu’à cadrer et à déclencher. Autre exemple, pour photographier les orages. Sans point de repère, il est souvent nécessaire de faire quelques essais avant de trouver et d’ajuster la mise au point. Avec le mode infini vous serez immédiatement prêt à shooter le moindre éclair sans avoir à vous soucier de savoir si la MAP est bien positionnée.

AVIS DE MAXIME TESSIER

Pour l’A7s, ce 24mm est dans la lignée de ses grands frères, un objectif avec autofocus excellent à un prix très intéressant. En astrophotographie on aura des étoiles très fines en gardant une ouverture très intéressante (dès f/2 à l’A7s), ainsi qu’un chromatisme largement gérable sur un logiciel dédié.

La mémorisation de la position de mise au point à l’infinie est quand à elle une réelle surprise plus qu’un gadget, elle permet de naviguer sur les différents lieux de prises de vue pendant la nuit tout en économisant un temps précieux sur la mise au point, une optique de cette taille étant très peu soumise aux effets de dilatations thermiques que l’on va rencontrer avec de grosses optiques en ciel profond par exemple. En revanche on pourra regretter que ce mode ne puisse pas rester activé à l’allumage du boîtier, il faudra penser à chaque fois à rester appuyer sur le bouton lors de l’allumage de celui-ci. Mais nous pouvons penser que des améliorations pourront être faites à l’avenir, puisque qu’il premier à posséder cette technologie.

La prise en main lors de l’utilisation sur un boîtier Sony sans grip est parfaite, l’objectif est court et léger tout en restant de bonne construction, la bague de mise au point donne par exemple une bonne sensation de précision.

CONCLUSION – POINTS POSITIFS ET NEGATIFS

Samyang nous délivre ici un objectif grand angle dédié à l’astrophotographie très intéressant, innovant et agréable à utiliser. Le mode “astrophoto” est une vraie innovation qui apporte un confort très appréciable lorsque l’on est sur le terrain ! Utilisable à f/2 tout en gardant une bonne qualité d’image pour aller chercher de la lumière lors d’une session de paysage nocturne dans un endroit très sombre, ce 24mm f/1.8 FE montre toutefois des aberrations chromatiques visibles sur les étoiles les plus brillantes… mais elles peuvent être facilement corrigées sur les logiciels de post-traitement, et les profils de correction dédiés devraient bientôt être disponibles.

Au-delà de l’utilisation en paysage nocturne, cet objectif est très performant en photo quotidienne, la qualité d’image est au rendez vous, l’autofocus est très réactif et le rendu des couleurs fidèle.

Points +

  • La finesse des étoiles, très appréciée
  • Une optique qualitative en photographie de paysage nocturne dès f2
  • Le système de mémorisation de la mise au point à l’infini !

Points –

  • Les aberrations chromatiques très prononcées aux plus grandes ouvertures, au centre comme au bord des images
  • Disponible uniquement en monture Sony

Nous remercions Samyang France pour le prêt de ce 24mm f/1.8 FE !

BONUS – QUELQUES IMAGES AU SAMYANG AF 12mm f/2 E

Samyang propose un second objectif dédié à l’astrophotographie, le 12mm f/2 AF E , pour boitiers Sony uniquement, équipés d’un capteur au format APS-C. Contrairement au 24mm, cet objectif ne dispose pas de la fonction de rappel de la mise au point.

Nous avons profité de notre séjour aux NCN dans les Cévennes pour faire quelques essais de l’objectif avec nos boitiers full frame utilisés en mode APS-C. La focale équivalente de l’objectif est de 18mm.

Globalement, le 12mm délivre à f/2 une bonne qualité d’image. Cependant les coins présentent quelques aberrations de coma et d’astigmatisme. Sur ce point, l’objectif est moins performant que le 24mm, mais proposera tout de même des images correctes sans être à la recherche systématique de détail et de performance optique.

En fermant à f/2.8, l’objectif proposera une meilleure qualité d’image, d’autant plus que la focale courte de 12mm permet de poser plus longtemps qu’à 24mm – environ 15s – donnant ainsi plus de temps pour collecter la lumière malgré une ouverture moins importante.

Ciel des Cévennes – Sony A7IIIa (APS-C), Samyang 12mm f/2 @f/2, 15 sec à 3200ISO

Les Pradines – Sony A7IIIa (APS-C), Samyang 12mm f2 @f/2, 3200ISO – Panoramique de 2x15sec